jeudi 30 décembre 2010

Découvrons ensemble dans la joie le système confessionnel du Liban

Je ne tiens pas à faire un article scientifique. Je ne suis pas un expert du sujet, que cela concerne le Liban ou les systèmes confessionnels. Je ne suis pas non plus un expert des communautés dont je vais parler et je saurai gré à toute personne qui trouverait dans cet article une erreur de m'en informer afin qu'elle soit corrigée.

Jusqu'ici, selon les cours que j'ai suivis et les discussions que j'ai pu avoir, j'ai appris que le système politique libanais n'était pas structuré de la même façon que les systèmes politiques traditionnels, en particulier les systèmes occidentaux comme le français. Toutefois, il ne faut pas croire que le cas du Liban est typiquement oriental. La présence d'une communauté chrétienne puissante est en particulier un des éléments qui rend ce système, si pas inédit, du moins original dans la région.

D'un point de vue purement juridique, le Liban est une démocratie. Les représentants sont élus, les tribunaux indépendants et les citoyens sont sous un régime de protection des droits individuels par la Constitution. Les libertés de culte, d'expression et d'association sont respectées (c'est flagrant dans le cas de l'association Helem qui milite pour les droits des homosexuels au Liban bien que l'homosexualité y soit proscrite). Parallèlement à ces droits et pratiques, vient se greffer un système confessionnel : si les droits des individus sont garantis, ceux des communautés religieuses également, et ce sont d'ailleurs elles qui gèrent la législation en matière de statut personnel (naissance, mariage, divorce, etc).

Le système politique à proprement parler est également confessionel : les sièges de députés sont répartis entre les communautés, et un candidat peut se présenter à la Chambre uniquement en briguant un siège de son culte (un maronite ne pourra être élu que pour un siège maronite, par exemple). Cependant, les députés d'une communauté sont élus par toutes les communautés (des maronites pourront donc voter pour un député sunnite).

On compte dix-huit communautés officiellement reconnues par la Constitution libanaise. Je vous en fais la liste exhaustive en ajoutant des précisions pour ceux qui se demanderaient par exemple la différence qu'il y a entre un sunnite et un chiite.

Les communautés musulmanes : On distingue à l'intérieur des communautés musulmanes la communauté sunnite (qui est la version "classique" de l'islam, et est composée historiquement de ceux qui suivirent le calife Mu'awiya. D'un point de vue idéologique, le schisme s'est fait entre eux et les chiites sur la légitimité du calife, qui est choisi par les croyants dans un certain cadre, et pas héréditaire. Théologiquement, les sunnites n'ont pas de clergé officiel, et leurs textes religieux de base sont le Coran et les Traditions du prophète Muhammad ainsi que de ses compagnons), les communautés chiites (qui sont la minorité dans l'islam, et considèrent que le calife légitime était 'Ali, en tant que cousin et gendre du prohète Muhammad. Les chiites ne parlent pas de calife mais d'imam. Ils ont un clergé officiel, reconnaissant la supériorité de l'imam en matière de jurisprudence divine. Leurs textes religieux majeurs sont le Coran, ainsi que les Traditions du prophète Muhammad et des descendants de celui-ci). Les chiites se divisent entre duodécimains, alaouites et ismaéliens (qui se distinguent entre eux sur des points de jurisprudence essentiellement). Dernière branche, quasiment inédite au Liban, les druzes pratiquent une forme d'islam caractérisée par sa dimension mystérieuse, l'absence de lieux de cultes et le refus de pratiquer la chari'a (loi divine exprimée par le Coran et les Traditions).

Les communautés chrétiennes : Ils se distinguent eux-mêmes avec d'une part les chrétiens catholiques dans toute leur variété (catholiques romains dont le pape est à Rome, catholiques syriens ou syriaques dont le chef de l'Eglise est le patriarche d'Antioche, catholiques arméniens qui se distinguent par une liturgie propre et un chef d'Eglise nommé -selon le Grand W- Catholicos-Patriarche de Cilicie des Arméniens, catholiques chaldéens dont le chef de l'Eglise est le Catholicos-Patriarche de Babylone des Chaldéens et qui prient en syriaque, les catholiques grecs melkites dont le chef d'Eglise est le Patriarche d'Antioche et de tout l'Orient, d'Alexandrie et de Jérusalem des Melkites* et enfin la principale communauté chrétienne au Liban, les maronites dont je parlerai plus bas). D'une autre part, on compte les Eglises orthodoxes (les grecs orthodoxes, les syriaques orthodoxes, les assyriens orthodoxes et les arméniens apostoliques) qui se distinguent également sur des questions de pontificat. A cela s'ajoutent des coptes et des protestants qui ne sont pas cités dans la loi du 13 mars 1936 dressant le tableau officiel des communautés religieuses au Liban.

Les maronites : les maronites sont apparemment la communauté chrétienne la plus influente du Liban. Le président de la République, par exemple, ne peut être que maronite (tandis que le Premier ministre ne peut être que sunnite et le président de la Chambre que chiite). Historiquement, la communauté maronite s'est construite autour de l'enseignement de Saint MAron( d'où son nom) et, tout en étant soumise à Rome, refuse de devenir catholique romaine. Ainsi, le patricarche maronite est indépendant et la liturgie se fait selon le rite maronite pour l'essentiel, en syriaque et en arabe.

Divisées légalement, ces communautés le sont aussi politiquement, chacune ayant son ou ses partis politiques exclusifs (mais pas réservés) et ses tendances (bien que les communautés soient partagées). Ainsi, le Parti Socialiste Progressiste est quasi-totalement un parti druze, les Forces Libanaisesquasi-uniquement un parti maronite, ou le Hezbollah quasi-uniquement un parti chiite. Divisés en terme de communautés, la scène politique l'est également autour de deux grands courants, le Mouvement du 8 mars et le Mouvement du 14 mars, qui se positionnaient au départ en termes de pro ou anti-syriens (prenant leurs noms de deux manifestations, celle du 8 étant pro-syrienne à l'appel de Hassan Nasrallah et celle du 14 étant la plus grosse manifestation anti-syrienne suite à la mort de Rafiq Hariri). Aujourd'hui, le 8 et le 14 se positionnent sur la question du TSL (tribunal créé par l'ONU pour régler la question de la mort de Rafiq Hariri), que le premier rejette tandis que le second l'exige.

Cet article n'est évidemment qu'un léger débroussaillage que j'ai pu faire en trente jours. J'ai l'intention d'approfondir, mais comme vous avez pu le comprendre, ce pays est relativement complexe et les enjeux sont multiples. Ce qui explique probablement en partie pourquoi je ne comprends toujours rien à sa politique.

*Titre complet : Patriarche des grandes villes d'Antioche, d'Alexandrie et de Jérusalem, de la Cilicie, de la Syrie, de l'Ibérie, de l'Arabie, de la Mésopotamie, de la Pentapole, de l'Éthiopie, de toute l'Égypte et de tout l'Orient, Père des pères, Pasteur des pasteurs, Pontife des pontifes, treizième des saints apôtres. (Source : Grand W)

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