jeudi 30 décembre 2010

Une simple petite question


Je passe beaucoup de temps sur mon toit. Il y fait bon le soir, on peut y dîner en regardant les lumières sur la ville, c'est très beau. En bientôt quatre semaines dans mon appartement, je crois que je n'y ai pas mangé que trois ou quatre fois.

Or, tous les soirs, nous nous posons la même question. En effet, il y a à Beyrouth au bas mot cinq feux d'artifices par soir. Ils ont lieu dans à peu près tous les quartiers de la ville, de façon très aléatoire. La plupart du temps, nous ne percevons de ces feux que quelques bruits d'explosions lointaines. Or, systématiquement, il est une personne pour s'interroger tout haut : pourquoi les libanais aiment-ils tant les feux d'artifices ?

On pourrait s'attendre, de la part d'un peuple qui a connu tant de conflits, à une certaine aversion pour les explosions. On me cite parfois des cas de personnes qui, ayant connu l'occupation il y a soixante ans en France, tremblent toujours en se rappelant du bruit des bottes. Pourquoi n'en serait-il pas de même au Liban où, il y a encore trente ans, une explosion dans la nuit n'était pas signe de jolies couleurs dans la nuit étoilée.

On pourrait aussi s'imaginer que les souvenirs du conflit de 2006 et d'autres lumières dans la nuit pourraient ne pas inspirer un tropisme exagéré de la population envers les boums-boums nocturnes. Avoir vécu en se demandant si le prochain "boum" ne serait pas pour nous pourrait légitimement pousser les libanais à être rebutés par de nouveaux "boums".

Un pays qui a connu plusieurs grands "boums", annonciateurs de tensions, que ce soient l'assassinat de Bachir Gemayel comme celui de Rafiq Hariri, pourrait ne pas avoir envie d'en provoquer de nouveaux. D'autant, enfin, que ce même pays se sent au bord d'un nouveau conflit, et qu'il nous est arrivé plusieurs fois, en entendant un feu d'artifices un peu atypique, de nous demander si "ça" n'avait pas (enfin) commencé.

En bref, je ne comprends pas cet amour pour la pyrotechnie. Et pourtant, il existe. A moins que ce ne soit qu'une pulsion presque désespérée, une volonté cachée de se débarasser des démons, et de tranformer les explosions en une improbable manifestation de vie...

Edit (deux jours plus tard....) : Finalement, j'ai eu ma réponse. Il s'agit encore d'une des merveilleuses démonstrations de richesse à la libanaise, dans un pays où les pétards sont hors de prix.... Mon romantisme et ma mélancolie en prennent un coup.

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